l’histoire du Petit Louveteau gris (épisode 6)

(épisode précédent)

– Qui ose parler de manger des légumes dans ma tanière ? Qui se permet de troubler ainsi mon sommeil? Tu seras châtié de ta témérité !
Vous l’avez deviné, c’était la Grand’louve qui dormait tout au fond de sa tanière et que le bruit avait réveillé. Bâillant et grommelant, elle s’extirpa du tas de feuilles et repéra les deux intrus. Pétrifiés, ces derniers fixaient les deux grands yeux jaunes qui trouaient l’obscurité. Le louveteau se découvrait un nouveau sujet d’inquiétude : sa Grand’louve était donc dans la tanière, et l’avait entendu parler des légumes… Quant à la fillette maigrelette, elle se cramponnait au petit couteau de poche qui tremblait dans sa main, et se disait que tout cela allait (très) mal finir…

La Grand’louve se tourna vers le louveteau et gronda :
– Ah, c’est toi ! Enfin, ce n’est pas trop tôt ! J’ai une faim de loup…Qu’est-ce que tu m’apportes ? De la galette et un pot de beurre, comme d’habitude ? Ta pauvre mère est bien gentille, mais elle n’a jamais eu beaucoup d’imagination…
Devant le silence du louveteau qui restait coi, la louve, du museau, avisa la fillette.
– Et c’est qui, là ? Tu amènes des invités chez moi, maintenant ? Et même, une invitée ! Je parie que ta mère n’est pas au courant !
Les deux petits gardant le silence, la vieille louve continua son soliloque :
– Mais j’y suis, ça n’est pas une invitée, c’est le repas que ta mère m’envoie ! Mais elle a perdu la tête ou quoi ?! C’est bien trop maigre ! Je n’en ferais même pas une bouchée…! Pauvre de moi, à mon âge, il me faut du moelleux ! Enfin… (Elle pointa la fillette) en tartine, ça passera mieux. Allez, donne-moi le panier avec la galette et le petit pot de beurre. Mais… ne me dis pas que le panier est vide ? Tu l’as mangé ? Et tu as partagé avec ça ? Ne me contredis pas, vous sentez tous les deux l’odeur de la galette et du beurre ! Ah vraiment, on a raison de le dire, qui mange une blette mange une galette ! D’ailleurs, après mon diner, on en reparlera de tes envies de légumes, de tes fringales végétales, petit malheureux !
La louve se tut, ouvrit une large gueule et passa sa longue langue sur ses grandes dents (rares mais pointues) comme pour mieux les aiguiser. C’est à ce moment que le petit louveteau gris dit :
– Ma Grand’louve, que vous avez de grands yeux.
La louve s’arrêta un instant, et, lâchant la fillette du regard pour fixer le louveteau, répondit :
– C’est pour mieux voir mes proies, mon loup. J’aime bien voir ce que je mange.
Le louveteau reprit :
– Ma Grand’louve, que vous avez de grandes griffes.
– C’est pour mieux attraper la fillette maigre que tu m’as apporté, mon loup.
– Grand’louve, que vous avez de grandes pattes.
– C’est pour mieux lui courir après s’il lui prenait l’idée stupide de s’enfuir, mon loup.
– Grand’louve, que vous avez de grandes oreilles noires et pointues.
– C’est pour mieux t’écouter, mon loup. Mais maintenant, ça suffit, les questions, j’ai faim !
La fillette avait compris que le louveteau essayait de distraire la louve. Elle voulu l’aider, et dit, sans trop réfléchir :
– Grand’louve, que vous avez de grandes dents.

(épisode suivant)

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