Alors, quand l’humain somnola, puis, dormant, ronfla, l’Initial l’ouvrit sans tranquillisant (Son bistouri tranchant suffisait à ça), prit un grand os dans son flanc profond, puis boucha son trou au flanc d’un sparadrap subtil. Dans l’os (tibia, radius, cubitus, qui sait ?), il tailla un pantin miroir à Son pantin (mais plus joli). Puis il lui montra sa production.
Sortant d’un profond dodo, hagard, ahuri, confus, mais ravi, son patin visa la prima dona puis divagua un long instant, disant : « Mon os, ma chair, ton nom, mon, ton, moi, toi, nous, chou, gnou, joujou… »
Chabada-chabada, fort, soudain, frappant aux poumons, aux os, faisant du plus malin un idiot riant à la nuit, l’amour, quoi (on sait tous ça, nous, aujourd’hui, mais pour lui, un choc inouï !).
Parmi d’aucuns animaux dus à Manitou, il y avait un rampant sournois, malin, qui plus tard prit Kaa pour nom (Rudyard Kipling nous l’appris dans un gros bouquin). Il dit à la nana alors sans nom ni surnom qui vaquait parmi dahlias mastocs, baobab nains, gazons ras ou buissons touffus :
« Vrai, ton Grand Patron aurait dit dans son jargon qu’Adam (nom du pantin) pourra tout vouloir, tout saisir, grignotant ou avalant, buvant ou gobant, sauf un fruit, dans Son jardin ? Mais toi aussi ? »
La souris dit à son tour :
« Oui, nous pouvons avoir tout fruit du jardin pour la faim, la soif ou la boisson. Mais quant au fruit du taillis malin, il a dit : non, trois fois non : pour prix, la mort sans moisir. »
Alors Kaa ricana :
« Foutu ? non. Fini ? non. Disparu ? non point. Illusion, oui ! Car Lui sait qu’un fruit du buisson vous ouvrirait l’imagination, l’approchant, Lui, pour saisir bon ou mal, ou pour avoir un avis moins obtus. Un futur pas plaisant pour ton patron : aboli, son bon plaisir, disparu, son pouvoir sans pair ».
à suivr’
* * *
En hommage à James Ussher qui a assigné la date du 23 octobre -4004 à la naissance du monde, une transcription de la première semaine de la Genèse lipogrammée en e.
illustration : Les Heures de la Vierge Marie, 15e siècle. BnF/Gallica.
C’est que dans Genèse, les e ne manquent pas ! Joli joli dis donc, et loufoque à souhait et ça ne manque pas d’images non plus 😉 ça promet pour la suite
merci Patchcath ; loufoque, oui, un peu 🙂
J’aime bien le sparadrap subtil. Toujours aussi jubilatoire, pensez à vous reposer le septième jour…
merci ; je m’arrête ce soir ou demain (c’est une genèse en semaine anglaise) 🙂
Chabada-chabada… Joli tout ça. Ah ! l’amour…
le chabada est venu tardivement, mais assez évidemment, comme un excellent résumé de l’amour 🙂 🙂
Vous avez toujours le terme exact.
Il l’aimait des lèvres et d’Adam… 🙂
Joli (du moins, palais, dirait A. Allais)
Sur que si on ne meurt pas , on manque de place pour développer son imagination.
Sûr, le temps ou l’espace, faut choisir !
Revisiteras-tu la genèse au point qu’on ignore à cette heure la fin de cette histoire?
c’est une idée ! pour l’instant, je suis à la lettre la version officielle…. mais un dérapage est toujours possible. ce qui est sûr, c’est que je n’irai pas jusqu’à la Fin des Temps 🙂
dingo rigolo mais à propos ! bravo !
märci bocoup 🙂
😀
La genèse, carrément ! la fable des fables, le mythe des mythes. Une valeur sûre. Manque pas d’air, Carnets. Fallait du culot. En tout cas c’est bien plus rigolo que l’original. Si si ! Tiens ça me donne en
vie de me retirer un os pour voir si je peux en tirer quelque-chose.
La genèse est aussi connue que le petit chaperon rouge ou que le corbeau et le renard : c’est donc facile de jouer avec, les lecteurs connaissant au moins vaguement la trame de l’histoire.
bon courage pour l’os 🙂
envie – et aussi en vie.
Ton style est quand même nettement plus divertissant que le texte original!
Merci ! mais non, je ne transcrirais pas toute la Bible 🙂
Méchant pied que le mien
qui s’enfarge à ras les marionnettes
et les cantatrices…
🙂
Ton sourire m’est bien doux.
Tant et tellement
que j’m’en veux de t’le dire, cher dodo,
car ce n’est pas bien grave,
mais guignol et divette.. y errent encore..
Et je ne parle pas ici de monsieur Aznavour
quand il chantait la veille, où il avait vingt ans.
Mais bien de nos jolis phonèmes fuyants.
Ouf… Excuse-la.
De tant tourner autour du pot.
C’est à croire qu’elle s’amuse un peu.
Même si d’aucuns croiront sans doute – pas toi je sais,
que je suis un peu folle.
Vu, lu, corrigu 🙂
Bon jour,
A voir aux liaisons, l’union, non point cahin-caha, l’hidalgo du jardin, un pays d’avant l’avant, inconnu d’aujourd’hui, star l’Adam, d’ici au bon sang d’un paradis corrompu jusqu’au trognon mais point du flanc … magistral … Bravo bis bis …
Max-Louis
je dirais même plus : Caïn-Kaa 🙂
Merci Max-Louis
J’aime bien les périphrases pour éviter les mots « femme » et « eve » – hihi ! Très marrant 🙂
Merci ! il y a des mots qui résistent au lipogramme 🙂
Le taillis malin ! 🤣🤣🤣 et Kipling n’est pas là pr hasard si je ne m’abuse, l’écriture avec le sourire dansant tissé dedans me le rappelle ! Je viens de faire la lecture dudit gros livre et de qqs autres à mes enfants et on a ri à en pleurer. Toi et lui, conteurs hors pairs !
Kipling est simplement arrivé là à la suite de Kaa ; mais c’est vrai qu’il est dans mes souvenirs de lecture (et de lecture à voix haute) 🙂
Passer d’Adam à Mowgli: quelle déchéance !
Zut, j’ai oublié Mowgli !
Mowgli est présent en filigrane: l’histoire se situe dans un lointain passé par rapport à celle de Kipling 😉