La mauvaise heure

Chaque jour la nuit s’allonge
l’aube ronge
le ciel écaillé de nuages
– minces futaines.

Le monde dans un grain de sable
qui nous a promis cette fable ?

La pluie rince et mouille
la terre, le ciel
où la lune, mince, rouille.

Le vent siffle et pleure
à méchante voix qui chahute
combien d’heures
perdues dans cette minute ?

Le paradis, une fleur sauvage
et l’infini ? Piètres mirages.

Marmaille, où vont les pages
une fois perdus les princes
dans la grisaille ?

L’eau tourne pierre à la fontaine,
orpheline l’étoile hésite,
faible lanterne à l’affût
de nos mérites.

Au creux de la main tient mon chagrin,
comme l’éternité dans une heure.

Frères, noyons nos fredaines
de grosses larmes hypocrites
à perdre haleine.

Le vent siffle et pleure
à maigre et vilaine voix de flûte
C’est pour demain la mauvaise heure ?
A la fin, zut !

* * *

Poème-du-dimanche paraissant (pour une fois) le dimanche ; pour l’agenda ironique d’octobre, Laurence voulait qu’on parle d’une heure un peu magique, d’une dame d’onze heures et qu’on cite quatre vers de William Blake tirés du poème Auguries of innocence :

Voir le monde dans un grain de sable
Et le paradis dans une fleur sauvage
Tenir l’infini dans le creux de sa main
Et l’éternité dans une heure.

La mienne (d’heure) a été tellement magique qu’elle n’advient que maintenant, oublie en route la dame d’onze heures et, si elle conserve leur ordre, bouscule un petit peu le beau quatrain initial. Illustration : Nuages dans le ciel de Paris, 1916, agence Rol. BnF/Gallica 

 

24 commentaires

    • Merci Gibu ! j’n’ai plus qu’à essayer de ne pas prendre de retard sur l’horoscope !!
      …et à ne pas perdre le fil des prédictions qui arrivent au galop ! 🙂

    • Merci Valéry (je suis touché !) ; mais alors il faudrait que j’en débusque une poignée d’autres de la même eau, sinon ça fera un recueil un peu maigre !

  1. La mauvaise heure se mesure à l’échelle du malheur. A quand le changement d’échelle ? Fôdra bien ksaarivinjour ! L’horoscope se prononcera-t-il en 2023 ?
    Peut-être même en novembre, mois plus vieux que son prédécesseur ?
    😃

  2. Y’aurait-il du vent par chez toi ?
    Un début de tempête ?
    Avec pluie et sifflements ?
    On dirait…

    Belle composition, en tout cas !
    Pas dans les temps…
    mais dans le temps
    (qu’il fait).

  3. Si la ponctualité est la politesse des rois, l’inexactitude est celle des poètes. 🙂

  4. Une poésie toute en demi-teinte, qui à défaut d’octobre nourrit bien l’esprit de novembre.
    Merci pour ta participation, Carnets, peu importe le retard. Après tout, qu’est ce que l’heure, sinon celle que l’on décide de vivre ? 🙂

  5. Dans une heure rêvée, cette participation est publiée à temps. 😉 J’aime comment les vers de Blake y sont désassemblés et réassemblés.
    Pour l’horoscope, je prédis que ce sera remis dans les temps, juste, mais dans les temps. 😁

  6. Je connais les vers de Blake mais je n’en ai pas retrouvé la trace, tellement ces fragments sont élégamment inclus dans ce texte, par ailleurs magnifique

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