Serait-ce possible alors ?

Je me souviens que quelqu’un m’a dit un jour – ou était-ce une nuit  ? – … c’est important, le moment où les choses ont lieu, non  ? C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi, ça veut dire beaucoup. Et il vaut mieux que je comprenne. Alors, jour, nuit  ? Ce dont je me souviens c’est que c’était un jour en France parce que je ne suis jamais allé ailleurs.

Et ce quelqu’un qui m’a dit quelque chose, qui était-il ? Si je l’ai su un jour, aujourd’hui je ne sais plus, je ne sais pas. J’entends encore sa voix mais je ne vois plus ses traits. J’ai la mémoire qui flanche, je m’souviens plus très bien.

Bref, ce quelqu’un m’a dit que les braves gens n’aiment pas qu’on suive une autre route qu’eux  ; et il a ajouté qu’ il suffit de passer le pont,  c’est tout de suite l’aventure.  Je me souviens qu’il a rajouté avec un soupir et un sourire : l’avventura… Je me suis dit que si tout le monde passait le même pont à la queue-leu-leu, ça devait être la même aventure pour tous, pas bien aventureuse. Mais je n’ai pas osé demander. Les histoires qui marchent au pas, cela ne me regarde pas.

Aussi, c’est que j’ai ma petite chanson qui me court dans la tête depuis toujours on dirait – cet air n’est pas né d’aujourd’hui. Elle chante du soir au matin et si je lui laisse la bride – faudrait pas que j’me laisse aller  –  c’est bien simple, je ne reconnais plus personne. Évidemment, si ça arrive en ville et que je suis avec des gens ça fait des trous des petits trous dans la conversation.

Mais de toute façon, il y a toujours quelqu’un pour dire quelque chose  : qu’il pleut sur les grands boulevards, ou que le lundi au soleil, c’est comme un oranger sur le sol irlandais : c’est quelque chose qu’on ne verra jamais. Parfois – souvent – c’est plus méchant : que madame Bélinda a fait ci… que monsieur Bucéphale, cela… Ou, plus intéressé, comme tout à l’heure ce garçon qui chuchotait à l’oreille de sa voisine une histoire de perles de pluie venues d’un pays où il ne pleut pas  ; guère logique, le gars, voire un peu opportuniste, je me suis dit, puisque une minute après il lui proposait un petit coin de parapluie – ou alors parlait-il d’un parapluie spécial, résistant aux perles de pluie  ? ça m’a tarabusté une seconde, mais je n’ai pas demandé. Je sais être discret. En tout cas, la jeune femme avait l’air de voir la vie en rose et de vouloir croire à son parapluie pearl-proof, alors j’ai pensé « si tu crois xavaxavaxava durer toujours, fillette, fillette, ce que tu te goures ». Mais je n’ai rien dit. Discret.

En fait, eux non plus, je ne m’en souviens plus vraiment. De quelles couleurs étaient leur yeux  ? Je ne sais plus. Ce dont je me souviens c’est qu’ils étaient heureux.

* * *

Fredonné pour l’agenda ironique de mai en pension musicale chez Alphonsine et  les heures-dilettantes. Il fallait écrire en musique, sur la musique, avec la musique, de la musique et en avant la musique… avec un impératif, (je cite) « se laisser inspirer par Quelqu’un m’a dit de Carla Bruni »  en glissant cinq titres d’autres chansons [paresseux, je n’ai pas compté], avant le 20 mai. Et jusqu’à dimanche prochain, on peut lire les autres textes (et voter pour ses préférés) ici.

57 commentaires

  1. Comme toujours, tu publies in extremis, et comme toujours tu me séduis… quoique, tu ne me sembles pas très curieux.
    Et puis, rassure-moi, un parapluie « pearl-proof » c’est bien celui dont les baleines se dressent vers le ciel pour récolter toutes les perles ? Parce que je ne vois pas bien une femme réagissant autrement !

    • il faut dire que Madame Bruni m’a laissé perplexe quelques temps…
      Je n’y connais pas grand chose mais il s’agit certainement d’un parapluie retourné, dit ramasse-perle 🙂

    • En effet Almanito ; mais bon, je voulais une histoire qui finisse bien. Après la fin du conte, comment leur histoire d’amour finira, ça ne regarde plus qu’eux 🙂

  2. Jolie macédoine de phrases musicales. A vue de nez il y a plus de cinq titres de chansons, mais, paresseuse, je n’ai pas compté non plus… Tu me fais tourner la tête…. 😉

  3. 36, Valentyne ? Au minimum. Ca n’arrête pas, c’est un festival, que dire encore une apothéose, un défilé majuscule, je n’ai pas arrêté de chanter. Et on voit là à qui on a à faire ! : je pense modestement que je les ai toutes repérées du plus vieux tube au plus récent. La faute à mon âge qui doit être proche du tien ou la faute à tes connaissances musicales d’une extrême étendue, comme les miennes, tiens ! Bref, tu me fais tourner la tête ! J’étais tout le temps à la fête !

    • en fait, j’ai pas compté les extraits mais – outre l’inévitable Madame Bruni – j’ai emprunté des phrases à Barbara, France Gall, Michel Berger, Mireille Mathieu, Noir Désir, Juliette Gréco, Georges Brassens bien sûr, Stone et Charden, Michel Bésu, Piaf, Téléphone, Sylvie Vartan, Balavoine, Claude François, Gainsbourg, Bourvil, Thomas Fersen et Jacques Brel…mais il est possible qu’il y en ai quelques autres qui soient passés à l’as, la faute à ma mémoire ramasse-miette 🙂

  4. Bizare, j’ai entendu des notes de musique qui se mélangeaient pour finir en brouhaha, mais ça me rappelle quelque chose, toujours un coin qui…
    Moi aussi je suis pour le recyclage bien ordonné.
    Bravo pour ces enchainements ;=)

  5. héhé… toutes ces musiques évoquées ont fait un grand brouhaha dans ma tête. Ça a presque rendu le texte inaudible 😀
    Félicitation cher Dodo.

  6. L’amour s’en fiche bien, de durer.
    Je crois que ce qui compte le plus pour lui, c’est de ne pas se sentir à côté de ses pompes, et de s’inscrire entièrement dans l’instant, en le laissant déployer ses ailes.
    La vie, la mort, l’amour aussi sait qu’il n’y échappera pas.
    Belle écriture chantante, avec une fin pleine de bonheur, voilà de quoi remplir les cœurs de bien-être en adoucissant les tristes amertumes des cœurs qui ont plié l’espoir.
    Ou bien il ne reste plus qu’à fuir le bonheur de peur qu’il ne se sauve ?
    Je ne suis pas tout à fait d’accord.
    Bravo pour ce si bel ajustement de titres.

  7. Un texte aux jolis harmoniques, une conclusion vibrante. C’est donc possible alors ? 🙂

  8. Des chansons, des mélodies, encore des chansons et encore des mélodies, et plein de notes qui restent dans nos têtes, et puis une autre note, excellente, à l’auteur qui nous met du soleil plein la tête, avant d’aller faire dodo sous un arbre, « car là », franchement, qu’est-ce qu’on a de plus intéressant à faire pour passer le pont (de l’ascension) que de jouer à qui « bruni » le mieux ? 😉

  9. On reconnaît bien le talent futé et ingénieux de Carnet Paresseux : ça c’est vraiment vous 🙂
    Votre texte m’a fait penser au film d’Alain Resnais « On connaît la chanson » un excellent film d’ailleurs.

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