« T’as vu la vue ? »

« Je t’ai réveillé pour que tu profites du paysage, continue le loup : t’as vu la vue ? Moi, j’aime bien venir ici, tout en haut de la montagne, à la fin de la nuit ; on voit le soleil se lever avant tous ceux de la vallée. »
La fillette jette un œil entre les troncs sombres vers la vallée en contrebas, où moutonne la forêt toute blanche sur le ciel noir. Elle n’est jamais allé si loin, ni si haut. Là-bas, un peu de gris se mêle aux nuages. C’est presque l’aube, bientôt le matin. Une phrase d’un conte lui revient en tête : « et au matin, le loup… » et elle se recroqueville en travers de la luge, frissonnant de peur et de froid. Pour l’instant, il admire le paysage – ou il fait semblant, pour mieux la surprendre ! Mais sitôt l’aube venue, ou dès qu’il se rappellera qu’il a faim… il va la manger !

Il faut vraiment qu’elle trouve une astuce pour le berner ! Que faire ? Gagner du temps en racontant des histoires au loup, des histoires si passionnantes qu’il voudrait en savoir la fin ? Et peut-être que quelqu’un, peut-être même un chasseur passera par ici et la sortirait de là. En plus, c’est facile, elle connait plein de contes. Il faut juste en trouver un pour commencer ! Sauf que devant le loup qui regarde toujours fixement l’horizon, où la première lumière du soleil glisse une longue langue rose derrière les crocs des montagnes,  – sans compter la fatigue, la faim, la nuit, le froid et la peur – sa voix se fige.

Voyons, que disent les contes quand on a affaire à un loup ? Voyons, comment les trois petits cochons s’en sont sortis ? Non, il faut une maison et une cheminée ! Alors, la ruse de la farine et des sept petits chevreaux ? Sauf que montrer patte blanche c’est une ruse de loup ; sans compter que dans la neige, ça ne servirait à rien… et de toute façon elle n’a pas de farine. Il faut trouver vite ! Elle se souvient alors de la fable du renard qui embobine un piaf en le flattant. Oui, d’accord, il ne s’agit pas d’un loup, mais d’un corbeau, mais ça n’est pas le moment de faire la fine bouche.
Alors elle tente le tout pour le tout…

 

à suivre !

***

8e épisode du feuilleton de Noël.

Illustration : New York public library, digital collections.

17 commentaires

  1. Suspens ..!
    En fait on prête toujours de mauvaises intentions au loup, alors qu’il peut être parfois doux comme un agneau…
    Tous ces préjugés ont la vie dure.
    Mais sous votre plume, les contes n’ont qu’à bien se tenir !
    Et alors, et alors …?

    • Il y a de l’idée (et puis à Noël, elle pourrait dire « si votre plumage ressemble à votre roi-mage)… mais le loup (qui connait ses fables) n’apprécierait pas d’être pris pour un corbeau ;et puis la fin, oups !
      🙂

  2. Mais non ! Pas de souci… L’auteur va trouver une belle pirouette pour sortir la petite et le loup de ce mauvais pas ! Il y a toujours moyen de faire apparaître Zorro ou Spiderman 🤣🤣🤣🤣

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