La tarte est bleue comme un citron
jamais une erreur les recettes ne mentent pas
alanguie dans le moule enfourné
sous les pois ou les cornilles
la pâte niche au très chaud de la flamme.
Dans le rond d’un bol
le sucre en poudre se mêle
des secrets de tous les sourires
– les zestes et les œufs de s’entendre –
le jus du citron est tout nu
au creux d’un beurre fondu bien vert.
La crème douce acidulée
se glisse hors du bain-marie,
se jette par la fenêtre autour du cou
de la pâte dorée qui ouvre
ses ailes aux fous et aux amours.
Chante le feu mille secondes.
Et voilà toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté.
***
Aujourd’hui, à la demande de Léonie, une recette pas facile du tout à la façon de Pierre Hermé. Comme on m’avait prévenu de la difficulté, j’ai demandé un coup de pouce à Paul Eluard. Et puis J’ai fait l’impasse sur la meringue.
illustration :Eupene’s Monsa lemon squash label, State Library of Queensland.
Quel merveilleux dessert! Juste ce dont j’avais envie! Le beurre vert… j’ai hesite un instant… mais j’ai fait confiance. Ca valait la peine. Quelle bonheur synesthetique!
Merci victorhugotte ; pour le beurre vert, j’ai hésité moi aussi ; et puis Eluard a insisté 🙂
C’est tout simplement délicieux, et ça m’a fait penser à « la cimaise et la fraction »…
Miam et bravo.
¸¸.•*¨*• ☆
je viens de chercher qui était cette cimaise et cette fraction
Raymond bien sûr …..
La cimaise ayant chaponné
Tout l’éternueur
Se tuba fort dépurative
Quand la bixacée fut verdie :
Pas un sexué pétrographique morio
De moufette ou de verrat.
Elle alla crocher frange
Chez la fraction sa volcanique
La processionnant de lui primer
Quelque gramen pour succomber
Jusqu’à la salanque nucléaire.
« Je vous peinerai, lui discorda-t-elle,
Avant l’apanage, folâtrerie d’Annamite !
Interlocutoire et priodonte. »
La fraction n’est pas prévisible :
C’est là son moléculaire défi.
« Que ferriez-vous au tendon cher ?
Discorda-t-elle à cette énarthrose.
– Nuncupation et joyau à tout vendeur,
Je chaponnais, ne vous déploie.
– Vous chaponniez ? J’en suis fort alarmante.
Eh bien ! débagoulez maintenant. »
(Raymond Queneau)
je connaissais le procédé mais je le redécouvre avec
La fraction n’est pas prévisible :
C’est là son moléculaire défi.
La fourmi n’est pas prêteuse
c’est la son moindre défaut ……………
Merci ! J’ai été beaucoup moins systématique que Raymond et ses « S+7 » ; me suis contenté de fourrer une recette dans un poème d’Eluard 🙂
J’ai juste dit que ça m’avait rappelé … 😉
On « M » comme merveilles des mots qui s’emmêlent et s’entremêlent et se méliméloent à foison. Merci Raymond, merci Dodo, merci à cette langue goutue, gouteuse, gouleyante, gourmande qu’on esgourde comme la goualante du pauvre Jean, avec appétit.
Très sensuelle cette pâte alanguie dans le four…..
J’aime beaucoup la personnification de tous ces ingrédients 🙂 La prestance du citron est fabuleuse …est ce du à sa nudité ?
Le citron devait assurer : c’est SA tarte, après tout !
comme disait l’autre, c’était son quart d’heure de célébrité (et de cuisson) 🙂
Léonie. – Dites-moi Carnets, ils sont bio les citrons que vous avez utilisés ? J’en ai pas l’impression. Bon, évidement, le must aurait été d’avoir sous la mains des citrons de Menton : je vous l’accorde, ce n’est plus la saison.
Sinon, c’est pas mal du tout… La pâte « sous les pois ou les cornilles », « La crème douce acidulée »… Aaaggghh ! J’en ai le zeste de citron à la bouche !
Merci Léonie ; les citrons sont bio, bien sûr ; et malheureusement pas de Menton 😦
Merci Carnets !
Défi très réussi !
😉
Merci ! ça n’a pas été facile mais je me suis bien amusé 🙂
une fois que le jeu de mot du titre s’est imposé, la suite était tracée ; il n’y avait plus qu’à farcir Eluard avec les étapes de la recette (si on peut dire)
Ah ah ! Je parle de farce dans l’épisode 3 de Black Dolls et ça vous concerne !
La recette est chaude ce matin 🙂 un grand poème d’amour auquel on ne s’attendait pas, tu es surprenant et très fort monsieur Carnets, bravo!
L’aide de Paul Eluard a été déterminante (m’a même prêté les trois derniers vers de son poème….! c’est lui qu’il faut remercier 🙂
Ouf, j’ai rattrapé la crème lorsqu’elle s’est jetée par la fenêtre !
Quel dessert, mais quel dessert !
C’est Pauléluard qui a laissé la fenêtre ouverte 😉
Quel inconscient ! Laissez s’échapper un tel bonheur savoureux ! En tout cas tu excelles dans l’art de sublimer les recettes ❤
La cuisine à Dali ?
un dessert de Gala, à n’en point douter.
Un dessert de Gala, ça serait avec du chocolat Lanvin, non ?
🙂
Merci Valéry !
J’adore ! Ca croustille, ca frémit et s’enhardit, ca titille Eluard aux papilles, et pis alors qu’est-ce que ca sent bon ! Comment fais-tu pour donner rendre WordPress si appétissant ? Vraiment cette recette me plaît !
Ben… comme je ne savais pas comment traiter cette recette plutôt compliquée, je me suis laissé aller à une décalque du titre du poème d’Eluard ; il n’y a que le premier pas qui coute, il n’y avait plus qu’ à détourner le reste du poème.
y a plus qu’à, y a plus qu’à, mais faut le faire, tout de même !
En poésie culinaire, il n’y a pas photo, tu es imbattable…
Le problème, c’est qu’à force de lire tout cela,
on se jette sur les fourneaux…
et on prend quelques kilos ! 🙂
D’ailleurs, je m’y suis mise récemment , aux fourneaux…
à ma façon…bien sûr !
https://filigrane1234.blogspot.fr/2018/05/chat-touille.html
C’est jubilatoire !
bah, une recette de mot et une cuisine de mot, ça donne des kilos de mot, non ?! autant dire rien 🙂
mais s’il y a une demande, je chercherais des recettes de régime 🙂
Eluard et une tarte au citron, voilà qui s’annonce bien ! 😉 Tu as bien fait de laisser tomber la meringue, ce n’est pas le meilleur ! 😆
N’est-ce pas, la meringue, on s’en passe bien.
Et puis Eluard n’en parle pas.
Voilà, exactement !
Dieu, que c’est beau ! Les recettes devraient toujours être animées du sentiment d’aimer, ça crée une saveur encore plus délicieuse !
Dans tes mots j’y ai aussi vu une invitation à lire un tableau… 🙂
Et ça sent bon, en plus!
[…] Un poème de Matéo peut s’écrire dans un salon, une voiture, sur un toboggan, la tête en bas, les jambes en l’air. J’ai choisi d’écrire sur le mien dans la cuisine, en surveillant mon gâteau au citron nu (j’avais plus de pâte à tarte). […]
On dit bien « cuisiner… avec amour », et « lire les carnets paresseux… avec bonheur ». J’adore le week-end à ta sauce amoureuse et acidulée. Quant à la référence éluardienne, elle ne peut que finir de me séduire complètement (petit smileys tout rouge!)
[…] Carnets nous fait saliver avec un citron nu ou une tarte bleue […]
Quelle recette ! J’en ai l’eau à la bouche.
Bravo pour ce texte sensuel et délicieux.
Ce poème est un délice, je croyais te l’avoir déjà dit! La référence à Eluard comble de joie mon petit côté groupie!
[…] Carnets nous fait saliver avec un citron nu ou une tarte bleue […]
Un délire culinaire !!
Un délice promis qui met l’eau à la bouche !!!