Noël ne fait pas de cadeau (8)

… (et sa bande-son originale)

Kézaco, la Chaos ? Comment je saurais ça, moi ? Voyons, cé-hache-ah-oh-esse…. Cé, ça peut être Compagnie ou Collectif, ou Club..… hache, Historique, ou plutôt Horloger ? Ou heure ?  ? Ah : Anarchique ? Anachronique ? ça ferait sens….Oh : Organisation ? Ordre ? mais ça va pas trop avec Anarchique… Esse ? Saison ? Seconde ? Soleil ? Alors, ça donnerait quoi : la Confrérie des horlogers anarchistes oublieux des saisons ? Ou de l’ombre et du soleil ?! pfuu…

Devant le silence qui s’éternise et mon air idiot, l’horlogère daigne lâcher quelques bribes d’explications :
« Pas la peine de chercher un acronyme. La Chaos est une société secrète très très ancienne. Trop compliqué de vous expliquer tout ça, fallait mieux écouter à l’école. Bon, pour faire simple, Chronos et Chaos sont très deux anciens associés. Et puis ils ont eu une grosse divergence sur la façon de passer le temps. Disons que Chronos est plutôt dans la gestion et l’ordre alors que Chaos avait une vision plus… libre. Bref, Chronos a gardé la maison-mère et Chaos a  monté sa propre bande. Depuis les deux équipes se sont fait toutes les embrouilles possibles. Mais ce coup-ci, la Chaos a fait fort : lâcher la bride aux petits trafiquants pour distraire l’attention, doubler la diversion en envoyant Novembre vous chercher, et en douce, remplacer Décembre par un de leur sbires… Tout simple, et pendant qu’on regardait ailleurs, hop, voilà le loup dans la bergerie.
– Mais pourquoi faire ?
– Vous ne voyez vraiment pas ? Si le faux Décembre avait annulé Noël ? Vous imaginez la panique ? Ou s’il avait refusé de passer la main à Janvier ? Bloqué le calendrier ?
– Là, ça serait le chaos.
– ‘Xactement, le Chaos. On est arrivé à temps. Enfin, il y a encore du boulot : retrouver Décembre, le vrai, chercher s’il y a d’autres infiltrés, vérifier les comptes, regarder si le calendrier est détraqué, recompter les heures perdues et les dernières minutes….

Quoi disant, elle pousse le cadre de la Mort et l’Ange : le tableau pivote, dévoilant une grande pièce remplie de registres et d’horloges. Dans l’ombre, une forme allongée gigote faiblement. L’horlogère se penche :
« Bonne nouvelle, c’est Décembre, le vrai. Il est k-o, mais o-k. Bien, il reste plus qu’à arranger le reste du micmac.

Elle se relève, porte sa main à la boutonnière de la blouse.
– Mais d’abord…
Elle fait sauter le premier bouton.
– …on va faire les choses dans l’ordre…
Encore un bouton.
– …parce que ça fait un moment…
Un bouton.
– …que j’en ai envie.
Le dernier bouton saute, la blouse coule au sol et l’horlogère apparait devant moi, en uniforme de police. Elle me jette un regard glacé :
– Enfin débarrassée de cette fichue blouse moche. Mais respirez donc ! Bon, sans rancune, mais moi j’ai du boulot, et j’ai pas besoin de civil sur une scène de crime. Alors dehors, et puis motus ! »

Abasourdi, je sors du bureau, descends un escalier monumental puis traverse lentement le grand hall de la Chronos. Une fois dehors, je marche dans la ville comme un somnambule, sans que le froid piquant efface les effluves de parfum qui m’accompagnent encore. Sur une grande place, des employés municipaux enguirlandent un gigantesque sapin. Visiblement, le vrai Décembre a retrouvé son fauteuil et le temps a repris son cours. Enfin, presque : au détour d’une rue, un gars m’alpague et me demande si j’ai cinq minutes. Ah mais non, je ne suis pas Chronos, moi !

Bref, je ne sais comment j’arrive près de mon bureau. Là, le choc ! Je crois reconnaitre dans le hall l’abominable pardessus gris de Novembre. Tout recommence ? Mais non, c’est juste le concierge qui me tend ma valise en m’annonçant que le propriétaire a changé la serrure. Croiriez-vous qu’il y a des gens assez malhonnêtes pour profiter ainsi du malheur de leur prochain ?

Fin

* * *

…si vous avez raté le début … la suite (2) & (3) & (4) & (5) & (6) & (7)

Le jeu de Noël  : il y a (environ) cinquante-cinq titres de la Série noire glissés dans les huit épisodes du feuilleton. Dans le dernier, il y en a aussi d’un des premiers français de la Série noire, Jean ou John Amila. Bref, le premier qui donne le nombre exact des titres d’Amila du dernier épisode gagne un cadeau surprise que je ne dévoile pas ici parce que sinon ça n’est plus une surprise. Question subsidiaire en cas d’egzéco, il y a aussi un titre qui n’est pas de Jean Amila… lequel ? A vous de jouer !