Le jour où assis dans l’herbe, le nez dans les nuages et à mes pieds les collines ronronnant d’abeilles et de cigales, je me suis demandé ce qu’est au juste un vice-amiral (mais comment font les autres pour ne penser à rien ?), j’ai songé que si j’avais seulement sous la main, sinon wifi et wiki – ici les cimes en chapelet filtrent rigoureusement les petites ondes du réseau, si fragile bidule – du moins le dictionnaire qui dort dans le bureau j’aurais pu illico assouvir ma soif de savoir, mais pas sans courir le risque d’une glissade incongrue de vice-amiral à vide-pomme ; que là, le besoin subit de vérifier une information neuve m’emmène cheminer jusqu’au Caucase – d’où la pomme serait originaire… – qu’alors, mon œil se serait peut-être posé sur un chrysanthème – tiens, ya un nigrec ? – à moins qu’une brève note sur l’épisode des fruits d’or des Hespérides ne m’ait conduit, curieux que tout étonne, à la muse Melpomène, à trois colonnes des merguez – étymologie controversée – et à petite distance des moines – mais depuis quand portent-ils un froc ? – et ainsi de suite de fil en aiguille et de matriochka en poupées russes… et puis, cigales et collines aidant, je me suis dit que ce vagabondage à rebrousse-page attendrait bien ce soir, à moins que d’ici là l’intrigant vice-amiral n’ait fait tout simplement naufrage dans la ronde apaisante des nuages qui glissent là-haut.
* * *
Le « jour-où-je-me-suis-dit » ? Mais qu’est-ce que c’est ? Juste une phrase qui commence par « le jour où » et passe par « je me suis dit » avant de finir par un point. Avec la participation exceptionnelle des mots proposés cette semaine par les Impromptus littéraires : pied, bidule, vide-pomme, chrysanthème, matriochka, merguez, froc et vice-amiral.
Laissons glisser …
oui, nuages ou pages de dictionnaire… glissons 🙂
ah! c’est tout beau ce texte, Mr Carnets !
Merci !!
Le dictionnaire, livre de chevet idéal…
Et indispensable même en balade ou pour rêver au jardin 🙂
Àh glisser de vice amiral à vide pomme ! Quel toboggan fabuleux ce dictionnaire !
J’avoue que la proximité imprévue du vice-amiral et du vide-pomme a joué un grand rôle dans cette petite histoire 🙂
J’avais adoré le film.
J’ai même envie de dire que je l’adore toujours. 😀
Alors je le dis.
Les poupées russes, un sujet de dissertation qui pourrait bien surprendre, tant son art est applicable à bien d’autres domaines. Mais tellement indicible, d’autres ont tenté de le faire, moi, je ne sais pas encore exprimer aussi bien toutes mes perceptions lorsque je me mets à penser, enfin, à méditer.
Merci Carnets pour ce très bel écrit.
Merci Jobougon… ici, la figure de la matriochka a surtout été l’alibi qui m’a permis de justifier l’escroquerie de coller les mots imposés dans un dictionnaire
(avec deux couches de nuages de chaque côté pour que rien ne s’érode)
🙂
Juste magnifique !
Bises
Merci Luciole !
Pour un paresseux tu as vraiment bien travaillé à ciseler ce petit bijou!
Merci Mo ; disons que j’ai mis au point une méthode nonchalante de ciselage paresseux 🙂