Doutes d’août

J’ai un doute.
Cela vaut-il la peine de partir au mois d’août ?
De se creuser la tête pour savoir où aller ? Mer, montagne, campagne ? Grèce, Italie, Cantal, Palavas, Anvers, Le Puy, Vancouver ou Knokke-le-Zoute ?
De vider les placards pour trouver les palmes, le tuba, les chaussures de rando, le parasol, et d’essayer de faire tenir dans une pauvre valise tout ce barda propre à remplir une soute ?
De charger à la hâte une voiture de bagages (ou de remplir de bagages une voiture ? Dans le premier cas, le lecteur peut croire qu’on met la voiture dans les bagages, non ? Zut, j’ai un doute. Encore un) ? De démarrer à l’aube pour rouler toute la journée et arriver plus vite en même temps que les autres (la France est bien le pays de ceux qui se lèvent tôt) dans le gros bouchon annoncé depuis quinze jours là où il a lieu tous les ans, sur l’autoroute ?
Ou bien partir encore plus tôt, déjouer les pièges de la route en passant par les petits chemins malins, pour suivre, tôt ou tard mais immanquablement, le tracteur rageur d’un agriculteur en déroute ?

La peine de gagner un coin perdu de campagne, de sable ou de montagne où se trouvent déjà – où ne tarderont pas à arriver – pleins d’inconnus et peut-être même mes voisins, ou, pire, un camp scout ?

La peine de chercher dans les guides l’auberge spécialité-du-pays-et-ses-trois-cents-douze-fromages, le restaurant vaut-le-détour ou le bistrot du petit-plat-dans-les-grands qu’on n’atteindra jamais, en tout cas pas à l’heure du service, et de me retrouver dans la pizzeria-cuisine-du-monde du centre commercial pour engloutir (encore chanceux) une tartiflette-paella-choucroute ?
D’acheter sur les marchés des produits-de-pays, du pain de campagne, des fromages laiteux, des fruits frais, des olives ou des myrtilles, pour finalement partager avec les mouches locales mon petit casse-croûte ?

La peine de m’emmailloter de lin et de coton et de m’oindre d’huile grasse pour, évitant les galets, griller au soleil entre sable et mazout ?
De me passer de grasse-matinée pour avoir le temps de randonner, crapahuter, nager, kayaker, visiter, et idem me priver de sieste pour recommencer l’après-midi avec la visite au musée de l’espadrille – ludique, interactive et pédagogique – pour m’effondrer, le soir, sous les coups conjugués du rosé – traitre – sans parler des taons, des guêpes et des moustiques -, knock-out ?

Et si j’étais parti en juillet ? Certes, j’aurais déjà vécu tout ça. Mais je serais déjà rentré. La ville serait à moi, déserte. Tous les magasins fermés – sauf la boulangerie et la pharmacie de garde. Déserte et encombrée de touristes – seraient-pas mieux chez eux ceux-ci ? – qui se tordent les chevilles sur les chaussées et les trottoirs éventrés par les services de voirie – partent jamais en vacances ceux-là ? ; au moins, j’aurais le temps de faire mes comptes et de me confronter à ma prochaine banqueroute.

Aussi bien, est-ce que ça vaut la peine de partir ? Corolaire, est-ce la peine de rentrer ? Décidément, ce début d’août est propice au doute.

41 commentaires

  1. Je te confirme : laisse le parasol il ne rentre pas dans la valise……. passe au petit blanc de Cassis moins traitre que le rosé………. quant aux chaussées et trottoirs, pas d’amélioration avant octobre, justement parce qu’ils prennent aussi des congés 😀 t’as essayé le larzac ou les îles Feroé, c’est moins encombré !!! et tu en repars sans trop de mal non plus…………

  2. J’ai résolu le problème : nous ne partons JAMAIS en vacances à part quand une bonne occasion se présente tous les six/sept/dix ans. Il s’agit alors de répondre à une invitation soudaine (qu’il ne faut pas refuser ! ) d’amis à l’étranger par exemple ou de fêter un événement extraordinaire qui n’arrive qu’une fois dans une vie. Alors, tout peut arriver et surtout, des découvertes magiques, des magnificences de paysages, des sensations tactiles ou olfactives inconnues, des saveurs à tester, des gens à rencontrer… bref, tout alors prend sens. On se remplit d’émotions qu’on ne pourra jamais plus oublier et qui rempliront nos âmes et nos cœurs. Bref, de vraies « vacances » au sens contraire de ce mot tragique !

  3. Qui commence par la certitude finit bien souvent par le doute…. alors comme tu as commencé par le doute, te voilà en bon chemin pour gagner une certitude … euh laquelle ? 😀

  4. Alors, tu pars ou tu pars pas! Tu m’as mis comme un doute, là! Moi, je partirai tout le temps, j’adore l’avant (l’avent?)! Si j’dis ça, ça n’a rien avoir avec le fait que je suis rentrée depuis 48 heures, hein! 😀 😀 😀

  5. Alors? Après le doute, quel choix?
    Nous, ce n’est pas difficile, nous restons bricoler à la maison une bonne partie de l’été? Il y a plein de choses à faire et les commerçants ne partent pas tous en même temps!

  6. Je t’ai lu en fredonnant Bashung (le secret des banquises)

    J’ai des doutes sur le changement d’heure, en été
    J’ai des doutes sur qui coule les bateaux, qui jette les pavés
    Des réserves quant à la question d’angle, pour le canapé

    J’ai des doutes sur la notion, de longévité
    Sur la remise à flot de la crème, renversée

    J’ai des doutes
    Est-ce-que vous en avez ?

    Est-ce-que vous en avez ?

    Et tu pars où ? Knokke-le-Zoute ? Beyrouth ?

  7. Joli itinéraire, au début du billet 🙂

    Evite Anvers-et-contre-tout, c’est plein de vilains.

    Août rime avec : route, déroute, choucroute, moumoute, knokke-le-zoutte (mal fréquenté par de capricieux vieillards lol)

    Sinon, y’a les ch’mins de Terre 😉

  8. Douter de ses doutes est une autre gageure mais au mois d’aout, c’est dégoutant. La chaleur fait fondre toute prétention. Un bond d’aout vaut mieux que deux tu auras. Belles vacances Carnets

  9. merci , ça m’a fait du bien de lire ça. C’est bien écrit, ça parle d’humanité sans la convoquer.
    pffff moi on veut me trainer en week end.

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