Sous les ponts où coule la Seine,
C’est tentant de se laisser bercer,
De dormir à perdre haleine et
de laisser couler sa peine.
Me pleurez pas, c’est pas la peine,
vos larmes iraient, c’est pas de veine,
Grossir le cours de la rivière
Et m’entraîner jusqu’à la mer.
Je descendrai la rivière au fil du flot,
Le nez dans l’eau, le ventre en l’air,
Jolie croisière sans bateau-mouche,
D’y songer l’eau me vient à la bouche.
En passant les ponts par en dessous,
Bien sûr je rirai comme un fou
A saute-mouton à chaque barrage,
Une pierre au pied pour tout bagage.
Je passerai la nuit aux écluses
Boire la tasse avec l’éclusier,
Moitié par blague moitié par ruse
Bienvenu s’il veut m’accompagner.
Si sous les ponts où coule la Seine
J’entends l’appel de la sirène,
Je compterai fleurette aux ablettes,
Rien qu’y penser me rend tout bête.
Et pour me distraire un moment
je serai poisson-pilote pour péniche
Pour faire plaisir, pas pour l’argent
(Quand on est mort pas besoin d’être riche).
Je prendrai pas mon permis de pêche,
Après tout qu’est-ce qui m’en empêche ?
Je crocherai des chaussons aux hameçons :
Je suis fait pour être heureux au fond.
Et s’il est vrai que la Seine débouche
Au bout d’une boucle dans la mer,
Je ne ferai pas la fine bouche :
Je serai fier d’être mort en mer.
C’est une réponse aquatique à « Je voudrais pas crever »?
J’aime bien.
Merci !
Je n’ai pas du tout pensé à Boris Vian (heureusement, je n’aurais jamais osé lui « répondre ») ;
[…] – Carnets Paresseux (notre Dodo national) nous présente un mystérieux poète du siècle dernier avec un titre qui pourrait faire penser à […]
[…] avec d’autres amoureux des mots bien dits (ClaudiaLucia, Les Narines des Crayons, Carnets paresseux, Eléonore, […]
Jolie croisière au fil du fleuve capital, si souvent chanté. Bravo à l’auteur (?).
Merci Modrone ! je transmets à l’auteur 🙂
J’aime beaucoup ce poème.
Au fil des mots, à sa manière, il m’entraîne et je dérive avec lui vers une humeur légère. Malgré la gravité. Bravo.
Patrick.
merci Patrick ; en effet, le poème est plus une invite à prendre les choses avec une petite distance souriante qu’une annonce de grand plongeon 🙂
Bravo, j’ai presque cru que c’était Apollinaire ! Mais des éléments troublants, caractéristiques du style Paresseux m’ont fait changer d’avis et j’ai dérivé avec plaisir en cette croisière de mort-vivant où la joie étouffe la mélancolie sous-jacente ! Tu poétisais sérieux en 2014 !!! 😆 J’aime beaucoup en tous cas ! 😉
hé non pas d’Apollinaire la dedans, rien que du Dodo, mais du sur-choix ! à l’époque – encore avant 2014 – j’écrivais une ou deux chansons par an (et je les rebricolais pendant les 10 ans qui suivaient 🙂
j’étais sérieux, comme tu dis !
Et oui, cela commence comme Apollinaire mais non ! C’est la ballade du Noyé qui cherche à vivre sa mort en vacances comme dirait Brassens !
Bien lu, claudialucia, il y a une grosse influence de Brassens 🙂
Tu nous la joue scène trois acte deux avec de multiples rebondissements pour un dénouement tragique mais n’oublie pas de jeter l’encre à bon port !